Chapitre 1 : Qui était Gustave Sennelier ?

Un matin de cette année-là – où était-ce l’année suivante ? –, Gustave Sennelier, qui habite quai des Grands-Augustins, emprunte, comme il le fait quotidiennement, l’omnibus à cheval qui longe les quais de la Seine. Comme tous les jours, il passe devant la boutique de Joseph Léon Prévost. « Il ressent une forte émotion lorsqu’il découvre un matin d’avril 1887 le panneau “Local à louer” accroché à la façade du magasin de couleurs du quai Voltaire. » Un peu plus tard, l’affaire est conclue et la vente entérinée par les archives de Paris. « Quelque temps avant d’être déclaré en faillite, le Sieur Prévost avait vendu son fonds de commerce, matériel et marchandises compris, à un Sieur Sennelier. »
Chapitre 1 : Qui était Gustave Sennelier ?
Gustave, fils de Nicolas Sennelier et d’Anne- Marie Pierrée, est né en 1865 à Saint-Mandé. Son père est boulanger ; il est aussi musicien et, le dimanche, rejoint ses amis pour jouer du violon dans les guinguettes du bord de Marne. Gustave n’a guère le temps d’approfondir sa relation avec son père. Ce dernier décède alors qu’il n’a que 10 ans. Anne-Marie a désormais charge de famille et la question ne se pose pas : à 16 ans, le fils interrompt ses études pour travailler. Bon dessinateur, précis, organisé, le jeune Gustave se procure vite un emploi dans l’industrie chimique où il réalise et dessine des catalogues. Fasciné par les formules depuis l’adolescence, il suit des cours du soir au Conservatoire des arts et métiers. Avec l’achat de la boutique de Joseph Léon Prévost du quai Voltaire, il réalise son rêve : fabriquer ses couleurs, devenir marchand de couleurs.
Sennelier
Mais qui sont donc ces marchands de cou- leurs ? Dans une thèse publiée en 2004 sur les Marchands de couleurs à Paris au XIXe siècle, l’historienne Clotilde Roth-Meyer nous explique qu’ils font partie jusqu’à la Révolution française de la corporation des épiciers « qui ont le droit de vendre en gros et en détail toutes les épices et drogues simples qui s’emploient dans les aliments, dans la médecine et dans les arts ». On en dénombrait 79 à Paris en 1817, 270 en 1830, 600 en 1885 lorsque Gustave Sennelier se met à son compte. C’est dire si la peinture a bonne presse ! Certains commercialisent le matériel d’artistes, d’autres comme Sennelier sont aussi fabricants.D'après le livre de P.Richard